Tumgik
#théâtrecontemporain
embellie82 · 6 months
Text
Tumblr media
Envie de rire un bon coup ce week-end ? L'Embellie n'attend que vous ! Rendez-vous Samedi 16 décembre à 21h au Théâtre de l'Embellie. Et pourquoi pas profiter d'une bonne assiette de produits locaux au passage ? (Réservation sur notre site) :
2 notes · View notes
severineklein · 10 years
Text
Résumés et extraits de Trilogie des sévices
Présentation de la trilogie - Résumés
Trois pièces, trois services publics, aujourd'hui ou dans un futur proche ; leurs logiques internes bureaucratiques y sont poussées à leur terme, qui est la destruction des « usagers » comme des fonctionnaires chargés d'appliquer un maquis de règles changeantes et oppressives ; les trois pièces donnent à voir cette logique dans trois cas : au guichet d'une administration totalitaire ; dans un collège en proie aux injonctions contradictoires de l'administration, de la société, des parents, des élèves... ; enfin, dans un hôpital où même les « soignants » peinent à sauver leur peau.
Les trois pièces peuvent être montées de concert ou séparément, en fonction des contraintes de production, quoique, bien entendu, elles ne prennent leur pleine résonnance qu'ensemble.
Pièce 1 : Le règlement des ventres
Dans un pays comme le nôtre, à une époque tangente de celle-ci, un guichet administratif. Des femmes attendent, dossier en main, pour obtenir le permis d'avoir un enfant. Les conditions sont draconiennes et tout est fait pour les décourager: humiliations, demandes extravagantes et même agressions physiques.
Une femme surgit, qui ne joue pas le jeu. Le pire la menace, semble-t-il, face aux quatre gardes violents et prêts à tout. Pourtant, ne pas jouer le jeu lui permettra de triompher, et de mettre en place ses propres règles... encore plus dures.
Pièce 2 : Discipline
Idris a frappé Nadine, la prof de maths. Le conseil de discipline se réunit pour décider de la sanction adéquate. Il a 45 minutes pour prendre une décision simple au premier abord. Simple ? Peut-être pas. Car professeurs, proviseure, représentants des parents d'élèves et des élèves, chacun a son avis, et l'affaire est moins claire qu'elle ne le paraissait ... Mais, quelles que soient les insuffisances de l'institution et de ceux qui la dirigent, ce sera quand même à l'élève de payer la note.
Pièce 3 : Répandez vos bons conseils sur sa douleur
Les Urgences sont pleines. Des patients disparaissent. D'autres souffrent du nèphre. On meurt d'une attaque foudroyante du ménisque, et puis on ressucite . La révolte gronde contre les privilèges exorbitants accordés aux morts et dont les vivants sont privés. Heureusement, une commission ministérielle a été nommée. La quête du bouc-émissaire peut commencer.
SCÈNES DIALOGUÉES EXTRAITES DU VOLET 1 :
LE RÈGLEMENT DES VENTRES
Scène 1
FG2
La nouvelle circulaire est arrivée.
FG1
Oui, celle d'hier? Je l’ai dévorée cette nuit. Y a pas à dire, ils savent écrire, en Centrale. Certains passages m’ont donné du fil à retordre tant ils étaient subtils, mais je pense avoir tout compris. C’est la meilleure circulaire depuis celle dite “des refusés” de 2003.
FG2
ça c’est celle d’hier. Je parlais de celle d’aujourd’hui.
FG1
Je me réjouis pas avance de la découvrir. De quoi traite-t-elle? Oh, peut-être une circulaire interprétative de la clause de deuxième mariage? Je dois dire que celle-ci me donne du mal.
FG2
Justin est parti cette nuit.
Elle fond en larmes.
FG1
Ou alors, une circulaire d’approfondissement de l’arrêté rectificatif du 30 janvier. Ce serait bien utile aussi.
FG2
On venait de faire l’amour pourtant! Pourquoi? Il avait joui dans ma bouche! Si j’avais su!
FG1
Tu aurais mieux fait de regarder la télé, que veux-tu que je te dise… Zut, voilà l’emmerdeuse.
Entre la cheffe de service.
La cheffe de service
Il est 09H01, Mesdames. Les fauves se pressent à nos portes et réclament leur pitance.
FG2
Il y en a beaucoup ce matin?
La cheffe de service
Plus qu’hier, moins que demain. Ah, et bonne nouvelle: le distributeur de tickets d’attente est vide. On va encore avoir une bonne petite émeute. J’ai prévenu les gardes.
FP1 frappe au guichet en indiquant sa montre. La cheffe de service fait signe à FG1 d’y aller. FG1 se rend au guichet de mauvaise grâce.
FG1
Quoi?
FP1
Il est 09H05. Je suis pressée, je dois aller à mon travail.
FG1
Vous allez crever.
FP1
Qu’est-ce que vous dites?
FG1
Je lis l’avenir et je vois que vous allez mourir.
FP1
Comment vous le savez? C’est horrible!
FG1
Vraiment? Pas sûr. Vous avez un anus artificiel et les aides-soignantes mettent un masque pour vous approcher, ce qui est déjà pas mal, parce que les médecins, eux, n’entrent plus dans votre chambre, tellement vous puez la merde. Ne me dites pas que vous n’avez pas envie d’en finir.
FP1
Je venais…
FG1
Donnez-moi le formulaire et les pièces justificatives. Ah, oui… Depuis hier, il faut aussi un certificat de défloration.
FP1
Je suis confuse, je ne savais pas. Est-ce que, exceptionnellement…?
FG1
J’engage ma responsabilité, Madame. Si la directrice entendait que vous avez fait cette suggestion… cela pourrait entraîner…
FP1
D’accord, d’accord, je reviendrai demain… J’ai bien indiqué que mon mari et moi avons des rapports quotidiens.
FG1
Oui, oui. Il y a les photos. Revenez demain deux ou trois heures avant l’ouverture, et je me débrouillerai pour que vous n’attendiez pas plus d’une heure ou deux après.
FP1
Vous êtes un ange!
La cheffe de service à FG1
Pas plus de 30 secondes par demanderesse, ou on ne va pas s’en sortir! Je vous l’ai déjà dit hier! La prochaine fois…
FP2
Je suis la n°2, je peux? Merci. C’est que j’ai dormi devant le bâtiment, avec les autres. Je crois qu’un garde m’a violée. J’ai le temps d’aller me laver?
FG1
On dit ça, on dit ça. Celle-là, je l’entends tous les jours. Où est votre dossier?
La cheffe de service
Un peu d’humanité, quand même. Il avait mis un préservatif?
FP2
Oh, je ne crois pas.
La cheffe de service
ça, c’est ennuyeux. (A FG1): Je dois faire un rapport. Tâchez d’être un peu plus efficace, et d’en dégoûter une bonne dizaine d’ici mon retour.
FG2
Ah, vous aussi vous avez lu la circulaire? Vous savez que je peux en réciter des paragraphes entiers?
La cheffe de service
Tiens, vous êtes là, vous? Allez donc les mettre en pratique, vos paragraphes, au lieu de tirer au flanc.
Elle sort.
FP2
Alors, il est complet, mon dossier?
FG1
J’en ai rarement vu un aussi beau! C’est la première fois que vous le présentez?
FP2
Oui… Merci! Merci! Et pour le délai…?
FG1
Vous ne vous êtes pas faite aider, au moins?
FP2
Oh, je sais bien que c’est interdit! Alors, je vais l’avoir, mon tatouage?
FG1
Il y a de bonnes chances, oui…
FP2
C’est merveilleux!
FG1
… Dès que l’enquête sur le viol sera terminée…
FP2
Quoi?
FG1
… et que le jugement aura été prononcé et sera devenu définitif, toutes voies de recours ayant été épuisées.
FP2
Mais… mais… ça va prendre combien de temps, ça?
FG1
Difficile de se prononcer avec précision. Voyez, je travaille ici depuis 8 ans, je n’ai pas encore entendu dire qu’une affaire de ce genre ait été définitivement réglée.
FP2
Je n’ai pas été violée.
FG1
Non? Vous avez dit le contraire il y a deux minutes! La cheffe de service a interrompu son travail pour aller faire un rapport!
FP2
J’ai rêvé!… J’ai cru… J’ai rêvé! Le rapport… Il faut l’annuler.
FG1
Comme vous voudrez. En direction des coulisses: Cheffe! La femme n’a pas été violée en fin de compte! Annulez tout!
La cheffe de service (depuis les coulisses)
Article 8 alinéa 15, tout de suite!
FG2
Tu as entendu? Elle veut un Article 8 alinéa 15!
FG1
Oui. Vous avez entendu, Madame?
FP2
Qu’est-ce que c’est?
FG1
Vous nous avez fait perdre de précieuses minutes avec votre viol imaginaire… Par conséquent… votre dossier se verra attribuer un nouveau numéro d’ordre de traitement égal à la puissance 5 de son numéro actuel, pondéré par l’indice d’activité sexuelle de votre couple, indice lui-même constaté par voie d’huissier.
Elle tapote sur sa calculette.
Votre dossier est donc susceptible de recevoir un avis favorable-oh, amplement mérité- d’ici… quatre à douze ans.
FP2
Quatre à douze ans! Mais je serai trop vieille!
FG2
Ça peut être moins, vous savez. Surtout s’il y a beaucoup de viols.
SCÈNES DIALOGUÉES EXTRAITES DU VOLET 2 :
DISCIPLINE
Scène 3
La salle des profs, vide.
Entre Nadine. Elle est un peu décoiffée, l'air hagard. Elle s'assoit, lâche son sac dont le contenu se répand sur le sol : classeurs, livres, copies à corriger, stylos...
Nadine : L'enfoiré. L'enfoiré. L'enfoiré.
Son téléphone sonne. Elle regarde l'écran, hébétée. Finit par répondre.
Nadine : Quoi ?... Si, si, ça va... ça va je te dis... Un jour comme un autre... Un de ces jours, je vais en tuer un, c'est sûr... (Elle commence à pleurer). Quoi ? Ça va aller, je te dis... ça finira par aller bien... un jour... l'été arrive... l'été, ça va mieux... mais là... là... ça va pas.
Il m'a frappée. Le petit con, il m'a frappée. Oui. Non. Rentrer à la maison ?... Tu peux venir me chercher ?... Ah... je comprends. D'accord. Non, non ne t'inquiète pas. C'est juste... pour sortir, il faut passer devant la salle où... oui... et puis traverser la cour... il y sera. Avec ses copains. Ils vont ricaner et... je ne sais pas si... Oui. Tu as raison. Je vais... attendre un peu. Oui. Boire un verre d'eau. Oui, il me reste du Lexomil. Toujours. Dans mon sac. Au cas où. Okazou (Elle rit nerveusement). Il y a toujours des « okazou » ici. Toujours. Je vais aller attendre... dans les toilettes. Ici (coup d'oeil vers la porte)... les collègues... requins attirés par le sang... dans les tranchées... Si, si, ça va. Quoi ? Non, j'ai pas parlé de requins... Tu as mal entendu... Attention, ça va couper.
Elle coupe la conversation. Le téléphone sonne, vibre, elle le regarde sans faire un geste, puis le jette contre le mur.
Au moment où le portable se fracasse contre le mur, entre Elisabeth.
Elisabeth : Nadine.
Nadine la singeant : Elisabeth.
Elisabeth : J'ai entendu parler d'un incident. Il semblerait que la rumeur se confirme, donc ?
Nadine prend un kleenex dans son sac et se mouche : Je veux la peau de ce petit enculé.
Elisabeth, lasse : Tu me racontes, ou je me contente des bruits de couloir ?
Nadine : ça te suffit, d'habitude... la manière dont tu as écrasé ce pauvre Paul tout à l'heure... où est la compassion ?
Elisabeth : Aaaah... la compassion... nous y voilà. Comme celle que tu manifestes pour le petit enculé, par exemple.
Nadine : Tu vas le foutre dehors, celui-là, j'espère.
Elisabeth : Miracle de la démocratie, ce n'est pas moi qui décide, tu le sais bien. Il y aura un conseil de discipline. A condition que tu fasses un rapport écrit. Et que tu ailles porter plainte au commissariat, bien sûr.
Nadine : Je sais. Mais c'est quand même toi qui...
Elisabeth : Qui ?
Nadine : qui... préside. Le conseil.
Elisabeth : Toi et Idris présenterez votre version, à tour de rôle. Et puis on discutera.
Nadine : J'assiste à la discussion, bien sûr ?
Elisabeth : Oui. Et puis... on votera.
Nadine : Tu vas proposer l'exclusion définitive ?
Elisabeth : Idéalement, oui. Mais on a de nouvelles instructions. L’exclusion définitive des moins de 16 ans n'est recommandée que dans les cas les plus graves.
Nadine : Et alors ?
Elisabeth : Il ne t'a pas blessée.
Nadine : Qu'est-ce que tu en sais ?
Elisabeth : Allons. Ne dramatise pas. Ecoute, tu es bouleversée, c’est normal, rentre chez toi. On reparle de tout ça au conseil de discipline, après-demain, à 8H00.
Nadine : Ah ? Déjà ? J'apprécie beaucoup tu sais. Je ne m'attendais pas à... ce soutien... ça fait vraiment une différence. Vraiment. Je...
Elle tente de prendre Elisabeth dans ses bras.
Elisabeth s'écartant : Oh, je ne l'ai pas organisé rien que pour toi !
Nadine : Tu... ?
Elisabeth : Je prévois deux conseils par semaine, quitte à les annuler s'il n'y pas d'incident.
Nadine : Et... dis-moi... tu en annules souvent ?
Elisabeth : Jamais.
Noir.
Scène 4
Un lieu de passage quelconque dans le collège
Elisabeth
Idris, au téléphone, traverse la scène de cour à jardin en parlant puis sort, sans la voir
Idris : Mais ouais Maman c'est rien j'te dis... c't'une embrouille d'la prof elle me dicave... trop chéman elle est... t'as qu'à d'mander... à la reum de Jo... elle te dira qu'la prof... J'ai rien fait j'te dis. J'ai rien fait. Elle m'a dit un truc bien dégueu, elle a pas le droit ! Si. C'est trop dégueu, Maman je peux pas te dire. J'ai rien fait. J'AI RIEN FAIT ! J'l'ai pas touchée ! En tout cas, elle a rien senti, tu penses, elle est trop yeuve... Les yeuves y sentent pu rien, y sont presque morts. Surtout elle.
Idris sort.
Elisabeth sort, pensive.
Scène 5
Entre Nadine.
Elle compte les chaises, les réarrange autour de la table. S'asseoit, se relève, bref manifeste sa nervosité. Mme N'Guyen entre dans son dos, Nadine ne s'en aperçoit pas.
Mme N'Guyen : Bonjour, Madame Sorisse.
Nadine, surprise : Bonjour, Madame... euh...
Mme N'Guyen : N'Guyen. Comme... N'Guyen.
Nadine : On ne se connaît pas, et...
Mme N'Guyen la coupe: Il n'y a pas de souci.
Un temps. Elles s’assoient.
Mme N'Guyen : Ma fille est en 6e.
Nadine : Ah.
Mme N'Guyen : Elle est première de sa classe.
Nadine : Bravo.
Mme N'Guyen : Il n'y avait plus de place au collège Saint-Michel. Alors on l'a inscrite ici, en attendant.
Nadine : En attendant... quoi ?
Mme N'Guyen : Qu'une place se libère.
Nadine : ça arrive souvent ?
Mme N'Guyen : Il y a des accidents. Les gens conduisent comme des fous, ne respectent pas les passages pour piétons, grillent les feux...
Nadine : Ah.
Mme N'Guyen : Nous sommes très optimistes.
Nadine: Et... vous avez voulu être déléguée quand même ?
Mme N'Guyen : Je suis toujours déléguée. Comment savoir ce qu'il se passe, sinon ?
Nadine : J'en conviens.
Mme N'Guyen : Ce n'est pas comme si les parents étaient consultés, informés, reçus... Non... ça n'arrive pas. Il faut se débrouiller.
Nadine : J'ai été surprise que vous connaissiez mon nom.
Mme N'Guyen : Je connais le nom de tous les professeurs du collège.
Nadine : C'est très... professionnel de votre part.
Mme N'Guyen : Je vous en prie. J'ai une petite fiche sur chacun. C'est tellement pratique. Un temps. Ce sera mon treizième conseil de discipline de l'année.
Nadine rit nerveusement : Treize ! C'est bien ma chance.
Mme N'Guyen : Chance ?... Je ne pense pas que les professeurs aient le droit d'entretenir des croyances superstitieuses. C'est un mauvais exemple pour les élèves.
SCÈNES DIALOGUÉES EXTRAITES DU VOLET 3 :
RÉPANDEZ VOS BONS CONSEILS SUR MA DOULEUR
Pièce unisexe
(...)
Le patient
Ça me gêne que vous me tutoyiez.
MÉDECIN 1
Si je t'ordonne de te déshabiller qu'est-ce que tu fais ?
Le patient
M1
Tu te fous à poil. Sans protester. Et je peux te tripoter autant qu'il me plaît. Et toi tu râles parce que je te tutoie ?
Le patient
Je me déshabille ? Là, devant tout le monde ?
M1
Seulement si tu continues à me cacher la vérité.
INFIRMIER/ÈRE1
Docteur...
M1
Je suis en consultation, tu vois bien, idiot.
Inf 1
Docteur...
Docteur...
Ce patient... ne respire plus.
M1
Que veux-tu, c'est la conclusion logique de toute existence. Toute chose s'achemine inéluctablement vers sa destruction, entropie nous voilà. Appelle la morgue.
Inf 1
Pas besoin. Ils rôdent jour et nuit dans l'hôpital, sûrs de trouver du taf, ça et là. Ils finiront bien par passer par ici.
M1 au patient
La rhumato. Réponds.
Le patient
Je sais pas. Ils ont disparu. Je m'étais endormi dans la salle de douches, quand je me suis réveillé toutes les portes des chambres étaient ouvertes les chambres étaient vides les lits refaits comme si personne n'avait jamais été là il n'y avait plus personne j'ai crié personne rien je me suis enfui.
Inf 1
Et tu es revenu ?
Le patient
Pardi, j'étais pas guéri, si ?
Inf 1
J'ai entendu dire...
M1
Quoi ?
Inf 1
Rien. Pas devant eux. Plus tard.
Aux patients : vous allez me suivre. Donnez-moi vos feuilles de circulation.
Plusieurs patients
J'en ai pas !
Inf 1
Ceux qui en ont une, déchirez-la en 2 et donnez un morceau à quelqu'un d'autre.
Défilé des patients qui remettent une demi-feuille déchirée à Inf 1
Ils sortent sauf M1 et le patient mort.
M1
Combien étaient-ils au fait ? 5 ? 10 ? plutôt 8. Oui, disons 8.
Au dictaphone:
5 février 10H00. Examen de 8 patients. 7 envoyés pour hospitalisation en néphrologie. 1 décédé en cours d'examen.
Rectification : « avant l'examen ».
Moi je dis toujours : on guérit parce qu'on doit guérir, et quand ça veut pas, ça veut pas. La preuve : le pauvre bougre croit avoir mal à l'estomac, sa femme l'amène ici, il attend, il a mal à l'estomac, il attend, trois, quatre, cinq, huit heures. Son mal à l'estomac, c'était un infarctus, à peine je le touche, c'est fini. Les vacances en Croatie, fini, le collègue emmerdant, la photocopieuse toujours bourrée, fini, fini, et porter la voiture au garage, et tous les soirs lire une histoire au gosse parce que sinon illettrisme CAP chômage, et pointer le relevé de carte bleue parce qu'il y a rien à la télé, fini fini fini. F.I.N.I.
Le patient mort
ça m'a fait du bien ce petit somme. Je vais rentrer à la maison je pense.
M1
Au dictaphone
Rectification : pas de décès.
Au patient
un peu plus et tes organes vitaux baignaient dans le formaldéhyde.
Le patient mort
Quoi ?
M1
Tu étais clamsé, décédé, canné, tu avais cassé ta pipe, avalé ton extrait de naissance, calenché, claboté, passé l'arme à gauche.
Le patient mort
M1
Mais c'est passé tout ça, tu vas pouvoir te remettre à pointer le relevé de carte bleue chaque samedi soir.
T'en as de la chance.
Le patient mort
Je fais quoi maintenant ?
M1
Ce que tu veux. Mais pas ici. Ici, c'est pour les malades, pas pour les ressucités.
Le patient mort
Je peux avoir un arrêt de travail ?
M1
Pourquoi ?
Le patient mort
Puisque je suis mort.
M1
Plus maintenant.
Inf 1 revient.
Inf 1
AAAAAAAH
M1
Ta gueule bon sang !
Inf 1
Il est plus mort ?
Le patient mort
Si, si.
En même temps, M1 :
Non !
Le patient et M1 crient plusieurs fois Si ! Non !
Entre M2.
M2
Putain c'est quoi ce bordel ?
M1
Ce patient est ingérable ! Il est guéri et ne veut pas s'en aller !
Le patient
Puisque je suis mort !
M2
C'est incroyable. Toi t'es pas capable de te débarrasser d'un malade ? Qu'est ce que je t'ai appris ?
Au patient : Je suis désolée, Monsieur. Un temps. Je peux prendre votre montre ? J'ai envie d'une montre de ce genre depuis des années.
Le patient
Si vous voulez.
M2 tend la main.
Le patient
Venez la chercher. Je suis mort, je ne peux pas bouger.
M2 s'approche et détache la montre du poignet du patient, la met dans la poche de sa blouse.
Le patient
Vous voulez mon alliance aussi ?
M1
Et à moi tu donnes rien?
Inf 1
Et à moi ?
Le groupe de patients revient.
M1
Qu'est-ce que vous foutez?
Les patients
Yzont pas trouvé le nèphre
quelle bande d'incompétents
Yzont dit que vous deviez finir votre boulot au lieu de le leur refiler
Yzont dit qu'on devait se plaindre au médiateur médical de l'Europe
Y nous sont même donné son mail
T'as noté ?
Non et toi ?
Je croyais que tu notais !
M1
Vos gueules !
M2
Ne leur parle pas comme ça, c'est contraire à la charte internationale de bientraitance.
Tu les as examinés ?
M1
Evidemment.
Les patients
Menteur !
M2 à Inf 1
C'est vrai ?
Inf 1
Oh moi j'ai rien vu.
M2
C'esr quoi cette histoire de... de nèphre ?
M1
Un truc qu'ils ont inventé. Tu sais ce que c'est, les patients comprennent jamais rien.
Le patient mort
Moi qui suis mort, je peux confirmer. Quand un médecin explique, je comprends que dalle.
M2
Celui-là, il faudrait le faire admettre en psy.
Le patient mort
Ah ? Vous aussi, vous trouvez que votre collègue est bizarre ?
M1
C'est de toi qu'il parle, abruti.
Inf 1
Un deuxième patient meurt.
Les patients
Docteur ! Docteur !
M1
QUOI ENCORE
M2
Tu as besoin de travailler ta CNV.
Tout ce qui suit se déroule de manière plus ou moins simultanée.
Les patients
Elle aussi elle est morte ! Elle est morte ! Au secours !
Le patient mort
Je connais, je suis passé par là, pas besoin de faire tout ce tintouin. On s'en remet très bien, regardez-moi, frais comme un hameçon. Depuis longtemps je soupçonnais que cette histoire de mort, c'était un truc pour nous faire consommer plus. Un complot pour qu'on achète des cercueils, des concessions perpétuitaires, des fleurs, des marbres funestes qui sans ça grands dieux n'auraient jamais trouvé preneurs, qui achèterait un marbre gravé de son nom par plaisir ?
M1
Ma CNV ?
M2
Communication Non Violente
Le patient mort
Vos gueules !
M2
Tu vas voir, c'est formidable, ça change ton regard sur le monde, les relations humaines.
Aux patients
Vos cris nous vrillent les oreilles, nous somme très gênés, comment à votre avis est-il possible de résoudre ce problème ?
Les patients
A l'aide !
M1
Vos gueules, on vous dit !
Les patients
On va tous mourir !
M2
C'est évident.
Les patients
Aaaaaaah
M1
Je crois que je saisis ce qu'est la communication non violente : tu les malmènes sans même les toucher, c'est ça ? Pas de traces ! C'est la médecine moderne ! Post-moderne, même.
Entrée des brancardiers
Brancardier 1
Il est où le macchabée ?
Le patient mort
C'est moi !
B1
OK, allongez-vous là-dessus.
B2
L'autre là-bas, il a l'air davantage mort, si je puis me permettre.
B1
Qui est mort en premier ? Grouillez-vous, on a aussi une moisson de cancéreux à rentrer.
Les patients
On a le cancer ! Au secours !
M1
Très bien ! Parfait ! Vous, là, emportez tout ça en radiologie !
Inf 1
Pourquoi faire ?
M1
une scinti, des écho, la totale !
Inf 1
Impossible.
M1
Hein ?
Inf 1
Ils n'ont plus de feuille de circulation. Ils ne peuvent pas circuler sans feuille de circulation.
M1
Pourtant, eux (désignant les 2 patients morts que les brancardiers tâchent de faire tenir à deux sur un seul chariot) circulent bien sans ça ?
Inf 1
Les morts ont des privilèges spécifiques. C'est d'ailleurs un sujet que le syndicat compte aborder prochainement en CRUCQ.
M2
En... quoi ?
Inf 1
CRUCQ : commission desrelations avec les usagers et contrôle qualité.
M2
Quels privilèges ?
Inf 1
Conbien de temps un vivant poiraute aux Urgences avant qu'on s'occupe de lui ?
M2
Euh.
Inf
Jusqu'à DIX heures ! Combien de temps pour un mort ?
M2
L'éternité ?
Inf
CINQ minutes ! Et hop il part directement dans un service qui lui est spécialement réservé !
M1
Lequel ?
M2
Ben, la morgue !
Inf 1
Cinq, oui cinq minutes pour un mort et dix heures pour un vivant ! C'est pas une discrimination, ça ?
M1
On ne peut rien objecter. Je suis heureux que nous ayons un CUCQ (prononcé cu) aussi... actif.
(…)
Entre la commission ministérielle
Le président/laprésidente de la commission au rapporteur
Notez : la structure hospitalière a mis en place l'ensemble des affiches détaillant les droits du patient hospitalisé ; elle atteint donc l'objectif de rang 3 n°1145 du Plan d'Action National d'URgence Générale et Efficiente.
Apercevant Inf2, B1, B2 :
Ah ! Des personnels soignants ! Au rapporteur : Le directeur m'avait pourtant promis que tout contact direct serait évité. Ces gens-là n'ont pas toujours bien intégré les contraintes de gestion et font des remarques sans rapport avec l'atteinte des objectifs du Plan National.
Le rapporteur
Puisqu'ils sont là... autant les interroger un peu.
Le président
Vous, là !
B2
Moi ?
Le président
Quelle connaissance as-tu du PANURGE ?
B2
Exhaustive. J'en garde un exemplaire dans chaque pièce de la maison, surtout les chiottes, et j'en relis quelques pages chaque jour.
Le président
Ah ah ! Très bien ! Es-tu, magré ton rang hiérarchique manifestement modeste, en mesure de citer un objectif de rang 1 du PANURGE ?
Inf2
C'est quoi PANURGE ?
B1
Tais-toi.
Le rapporteur
Vous ne l'avez pas lu ?
Inf2
Vous êtes une sorte de... commission d'enquête ? B1 tente de l'entraîner hors de scène. Des bébés sont morts ! Vous devez faire quelque chose !
Le rapporteur
La commission n'a pas été saisie de ce sujet.
Le président
Si un sujet de préoccupation apparaît dans l'exercice de vos fonctions, il convient de remplir le formulaire prévu à cet effet, qui suivra ensuite la voie hiérarchique.
Le rapporteur
Par ailleurs, nos constats nous conduisent à porter une appréciation très favorable sur la structure hospitalière à laquelle vous appartenez... encore...
Inf2
Mais...
Le président
La commission, estime que, sous réserve d'ajustements marginaux du fonctionnement transverse,...
Le rapporteur
« Marginaux », ou plutôt « limités » ou « incrémentaux » ?
Le président
...la structure et les règles de fonctionnement et les objectifs de performance comme les indicateurs associés...
Le rapporteur
...respectent l'intégralité des normes internationales et européennes de bonne gouvernance hospitalière... Vous voyez.
Inf2
Les bébés... les bébés sont morts... les bébés sont morts. Empoisonnés.
Le président, le rapporteur et le reste de la commission se dirigent vers la sortie.
Le président
Vous avez noté son nom ?
Le rapporteur
Bien sûr. Celui des deux autres aussi. Je vous le dis, président/e, ce rejet des procédures régulières mine nos institutions. D'ailleurs je souhaitais proposer un renforcement de...
Ils sortent.
B2 à Inf2
Va-t-en. Et tais-toi à jamais.
Langue
Pendue
Te
Pendra.
0 notes